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Juan Carlos Quezada récolte des échantillons de sols à Los LLanos.
© WSL/EPFL
ENVIRONNEMENT
Bien cultivée, l’huile de palme peut être durable
Transformer un ancien pâturage en culture de palmiers à huile présente un bilan carbone neutre, indique une étude de l’EPFL et de l’institut fédéral de recherches WSL.
Un projet du Laboratoire des systèmes écologiques (ECOS) et de l’Institut fédéral de recherches (WSL)
Actuellement, la culture de l’huile de palme est décriée pour son bilan carbone négatif et son impact sur la biodiversité. Mais une étude de l’EPFL et de l’institut fédéral de recherches WSL, parue dans Science Advances, apporte un discours nuancé.
En Colombie, quatrième producteur mondial, des alternatives à la déforestation ont été étudiées par les chercheurs de l’EPFL et du WSL au sein d’un projet transdisciplinaire du Fonds national suisse. Dans ce cadre, de larges pans de savanes de la région de Los Llanos transformées par le passé en pâturages ont été à leur tour convertis en cultures de palmiers à huile. En retraçant sur 56 ans le bilan carbone de cette conversion, les chiffres indiquent que le bilan total de carbone de cette culture, en incluant la végétation et les sols, est neutre par rapport au point de départ.
«Notre article détaille pour la première fois le bilan carbone sur le long terme de la culture de palmiers à huile, précise Juan Carlos Quezada, doctorant au Laboratoire des systèmes écologiques (ECOS) et premier auteur de l’article. C’est aussi la première fois que nous pouvons décrire les effets d’une telle production agricole sur le long terme après la conversion de pâturages sur la qualité et la fertilité des sols, en considérant non pas uniquement leur surface, mais aussi leur profondeur.»
Capture du CO2
Dans les climats tropicaux, les pâturages, particulièrement ceux qui sont dégradés, présentent de larges étendues d’herbe et quelques petits arbres épars. En plantant des palmiers à huile, qui peuvent atteindre jusqu’à 15 mètres de hauteur et qui sont densément placés, une plus forte capture du CO2 se met en place pour la même surface, grâce aux racines, aux troncs et aux feuilles des palmiers et à la végétation qui se développe autour d’eux. Après 25-30 ans, les palmiers sont coupés au ras du sol et de jeunes arbres sont replantés pour un deuxième cycle de culture.
En se décomposant, une partie des racines et autres matières végétales mortes va nourrir le sol et compenser partiellement en surface les pertes initiales de carbone dans le sol, après la conversion du pâturage. Sur le long terme des deux cycles de culture, le niveau de carbone stocké dans l’écosystème reste ainsi inchangé par rapport au niveau auquel il était avant la conversion du pâturage.
«C’est vraiment le bilan carbone et la perte de biodiversité de la déforestation qui posent problème, rappelle Alexandre Buttler, directeur du laboratoire ECOS. Les grands pays producteurs d’huile de palme ont pourtant des réserves de pâturages dégradés qu’ils pourraient convertir favorablement pour limiter les pertes massives de carbone liées à la déforestation».
Sandrine Perroud