50 ANS DE L’EPFL
«L’excellence est une asymptote, nous devons toujours nous demander si nous pouvons faire mieux»
A l’EPFL depuis… 24 ans
Martin Vetterli, Laboratoire de communications audiovisuelles, président de l’EPFL.

© François Wavre
«J’ai fait ma thèse en électricité à l’EPFL, au chemin de Bellerive. Quand je l’ai terminée en 1986, je voulais vraiment faire une carrière de chercheur. A cette époque, il fallait pour cela s’exiler aux Etats-Unis. J’y suis resté près de 10 ans avant de revenir à Ecublens, ayant reçu, de la part du président de l’époque, Jean-Claude Badoux, «an offer you can’t refuse». C’était en 1995.
C’était vraiment une EPFL complètement différente d’aujourd’hui. Elle était moins internationale, même si elle était déjà à la pointe de la recherche, très impliquée dans l’enseignement, avec des gens très engagés. Beaucoup de professeurs étaient d’anciens doctorants, présents depuis la création de l’EPFL. Elle n’avait pas encore ce réseau international même si beaucoup de professeurs étaient passés par les Etats-Unis. Mais c’était moins dans son ADN.
Les graines avaient cependant été plantées pour qu’elle devienne l’Ecole qu’elle est aujourd’hui, mais toutes les fleurs n’avaient pas encore connu leur phase d’éclosion. On devait aussi se distinguer de l’ETH de Zurich, avec sa longue histoire, ses nombreux Prix Nobel… Nous devions jouer sur un autre tableau, ce qui nous a clairement donné un esprit pionnier.
A l’époque dans mon laboratoire, on avait des doctorants internationaux, on a fait une start-up comme en Californie et on nous donnait la liberté de le faire. Déjà on aimait inventer des choses et prendre des risques. Il y avait ce côté entrepreneurial de l’Ecole qui est devenu son ADN et nous continuons sur cette voie.
Mes prédécesseurs ont posé les pierres nécessaires au développement de l’EPFL. D’abord Jean-Claude Badoux, qui l’a internationalisée en renouvelant le corps professoral. A cette époque, la Suisse était en train de s’ouvrir. La révolution Internet qui commençait aux Etats-Unis n’était pas encore arrivée ici, alors que le www avait été inventé par nos voisins du CERN. Puis, Patrick Aebischer, venu de l’extérieur, qui a donné ce souffle de nouveauté en instaurant le statut de tenure track et en amenant les sciences de la vie. Nous poursuivons ce formidable développement dans de nombreux domaines, notamment dans l’enseignement de la pensée computationnelle, et en développant des axes de recherche stratégiques pour l’avenir de l’EPFL.
L’excellence est une asymptote, nous devons toujours nous demander si nous pouvons faire mieux.»
«Une fertilisation croisée des savoirs assure une solide formation polytechnique»
Un regard sur l’EPFL depuis… 44 ans
Jean-Philippe Ansermet, Laboratoire de physique des matériaux nanostructurés.

«Je suis arrivé à l’EPFL en 1975 comme étudiant en physique. Depuis 1992, je suis professeur de physique expérimentale, et pendant 12 ans j’ai été directeur de section. Lorsque j’ai passé mon concours pour devenir professeur, on devait donner un modèle de leçon et l’on m’a demandé d’expliquer le mouvement de la toupie. Ce que j’ai fait devant le président Bernard Vittoz, car il assistait aux entrevues de tous les candidats.
L’EPFL fait une chose rare, peut-être pas unique, mais rare. Elle demande aux physiciens d’enseigner la physique, à des mathématiciens d’enseigner les maths et à des spécialistes des sciences computationnelles leur domaine. Pourquoi est-ce important? Parce qu’un physicien qui enseigne les maths risque de faire ce que les mathématiciens appelleraient du bricolage. Un mathématicien va enseigner des choses un peu lourdes et longues pour des non-spécialistes, c’est vrai, mais cela s’inscrit dans sa culture. Et nos étudiants sont ainsi formés par cette confrontation à différentes cultures. Une fertilisation croisée des savoirs assure une solide formation polytechnique.
Chaque année, je suis invité à un cours de Jean-Cédric Chapelier du Laboratoire d’intelligence artificielle. Il enseigne la programmation aux étudiants de physique et j’adore ce moment où je vais entendre mes étudiants: eux qui ont tellement de peine à comprendre mon cours de thermodynamique, ils tiennent un discours qu’à mon tour je ne comprends pas, élaborant des simulations numériques que je serais incapable d’envisager.
A l’EPFL, on inocule nos étudiants avec les schémas de pensée propres aux physiciens, mathématiciens, chimistes et informaticiens. Il en ressort des produits prodigieux!»
Propos recueillis par Sandy Evangelista

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